Kurupt FM renverse le vrai dans le faux.

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Une vraie émission de télé à propos d’animateurs d’une fausse radio pirate, eux-même inspirés de véritables Anglais immortalisées dans un documentaire quelques années plus tôt. Et dans une tournure d’événements qui n’aurait pas déplu à Guy Debord, MC Grindah et DJ Beats, les têtes «pensantes» de Kurupt FM, actualisent dans la réalité l’inaccessible succès auquel aspirent maladroitement leurs personnages.

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Je suis métonymie: Les dangers de confondre la partie et le tout.

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Par définition, le terrorisme est métonymique: un petit groupe de personnes est ciblé pour terroriser une population entière. On vise un symbole national pour attaquer les politiques d’un pays.

Le 11 septembre 2001, les États-Unis ont été attaqués.

Le 11 mars 2004, l’Espagne a été attaqué

Le 7 juillet 2005, Londres a été attaqué.

Le 22 octobre 2014, le Canada a été attaqué.

Mais le 7 janvier 2015, ce n’est pas Paris, ni la France qui était attaqués, mais un journal et une valeur.

Peut-être parce que l’enjeu de la liberté de dire, d’écrire et dessiner sans menace est tissé à la notion populaire de démocratie. C’est aussi une question d’intérêt pour ceux qui font l’information. Peut-être est-ce aussi parce que la relation entre le Québec et la France est plus «sanguine» qu’avec le reste du monde. Mais la couverture médiatique québécoise de l’événement a très peu cherché à mettre en perspective l’articulation «Charlie Hebdo/Liberté d’expression».

Elle avait le double avantage d’être simple, «virale» (en quelques heures des milliers de gens sont «devenus Charlie», la grande majorité, sans jamais avoir acheté un exemplaire du magazine ) et de mettre au centre des préoccupations populaires «les valeurs journalistiques».

Par contre, si on demande aux Français et à leur président ce que visaient les deux hommes armés, ils répondent «la république» avant «la liberté d’expression». Bien sûr, le choix du symbole de Charlie Hebdo n’était pas aléatoire: le magazine revendiquait le droit de critiquer et de tourner au ridicule le pouvoir, un élément structurel du républicanisme français et un acquis fondamental de la Révolution. Mais c’est un attentat commis par des Français, sur le territoire français, dont le contexte français ne peut être évacué.

Notamment: la France restreint plus la liberté d’expression que d’autres sociétés occidentales. Notamment celles du Canada et du Québec.

Plusieurs Musulmans français ont le sentiment que le droit de critiquer et d’attaquer est asymétrique dans la république. Les appels de soutien – souvent maladroits – aux tueurs de Charlie Hebdo et d’Hypercachère prennent en partie racine dans cette impression de double standard. Certaines lois semblent protéger spécifiquement certains groupes religieux et ethniques, comme l’article 9 de la loi Gayssot qui criminalise le négationnisme. D’autre, comme la loi Cazeneuve, fait les manchettes pour son application à Dieudonné, à un enfant de 8 ans et à des musulmans en état d’ébriété ou souffrant de déficience mentale légère. 

Des lois nuisibles

La solution à ce malaise ne devrait pas être d’accommoder les musulmans qui réclament des exceptions légales pour interdire les reproductions du Prophète, mais plutôt de déjucidiciariser au maximum le droit d’expression. Il faut faire confiance aux faits, aux institutions et à la rigueur intellectuelle et morale des sociétés libres pour discréditer les idioties. La loi devrait se confiner à ce qui cause du mal à autrui: le matériel pédophile ne devrait jamais être considéré comme acceptable, tout comme l’incitation à la violence et la distribution non-consensuelle d’images pornographiques.

Les suggestions de François Legault, qui visent spécifiquement les musulmans, sont l’exact opposé de ce à quoi une société pluraliste devrait aspirer. De la même manière, la nouvelle loi anti-terroriste des Conservateurs, appuyée par les Libéraux, étend inutilement au «terrorisme» des prédispositions légales qui ne touchaient jusqu’ici qu’aux discours haineux et à la pédophilie.

Les sections «commentaires» d’internet n’ont jamais été un puits d’intelligence, mais criminaliser celui qui «préconise ou fomente» une infraction terroriste «en général» ou saisir toute publication considérée comme de la «propagande terroriste» peut difficilement être un pas dans la bonne direction.

La pirouette finale à tout ça: 3/4 des Québécois appuient la loi fédérale, un appui aussi spectaculaire qu’inédit aux conservateurs et à leur obsession sécuritaire. Il y a sûrement plusieurs raisons circonstancielles pour comprendre cette statistique impressionnante. Mais l’échec des médias québécois de replacer l’attentat de Charlie Hebdo dans le contexte français empêche le public de prendre pleinement conscience qu’il peut être nuisible pour une société de compter sur la loi plutôt que le débat pour encadrer ce qui peut y être dit.

Ce que la condamnation de Ross Ulbricht change (même pour ceux qui ne contrôlent pas d’empire criminel)

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C’est fait. C’est dans les livres: Ross Ulbricht a été reconnu coupable d’être le fondateur, propriétaire et gestionnaire du site Silk Road.

La Couronne visait à lier Ulbricht à ‘Dread Pirate Roberts’, le pseudonyme qui était indubitablement central au site de commerce anonyme en ligne. La Défense cherchait elle à établir que ‘DPR’ pouvait avoir été/être une multitude d’individus, et qu’Ulbricht avait été piégé par d’autres.

Il aura fallu seulement trois heures et demie au jury pour en venir à la conclusion que les multiples occurrences entre les activités de ‘Dread Pirate Roberts’ et Ulbricht par la Couronne étaient plus solides que les thèses conspirationnistes de Dratel et Ulbricht. Ce n’est pas une surprise: plusieurs ont noté que la Défense a fait des choix tactiques discutables et que la fardeau de la preuve contre Ulbricht était accablant.

Les éléments principaux de preuves qui leur ont été présentés de par et d’autres se résument ainsi:

La Couronne:

– Ross a été arrêté dans une bibliothèque de San Francisco pendant qu’il chattait avec un agent-double du Homeland Service, alors qu’il était «loggé» sur le compte “/mastermind” de Silk Road.

– Un journal personnel remontant à 2010 qui détaille les étapes de créations de Silk Road et des activités (voyages, maladies, conversations, etc.) qui concordent avec la vie de Ulbricht (via Facebook et ses courriels).

– Un disque dur portatif contenant une copie du site Silk Road, trouvé sur la table de chevet de Ulbricht.

– 144 000 bitcoins retrouvés dans l’ordinateur de Ulbricht, dont au moins 20 % a transité par Silk Road.

La Défense:

– Il est difficile, voire impossible, de savoir qui est derrière une identité numérique.

– Ulricht n’a pas les connaissances techniques pour avoir monté au complet Silk Road.

– Il a obtenu ses bitcoins sur les marchés financiers.

– La tenue d’un journal aussi détaillé et incriminant est suspecte, et ne cadre pas avec la minutie de ‘DPR’.

– Deux fichiers sont apparus sur l’ordinateur de Ulbricht après son arrestation.  Et d’autres fichiers incriminant auraient été téléversés sur son ordinateur.

Ulbricht est donc coupable de participation à des activités criminelles; de trafic de stupéfiants, de piratage informatique, de blanchiment d’argent et de conspiration en vue d’obtenir de fausses cartes d’identités, dont les peines combinées minimum s’établissent à 30 ans. La perpétuité n’est pas inexclue.

Mais ce procès est digne d’intérêt même pour ceux qui ne gèrent pas un empire criminel, puisqu’il crée un précédent dans de nouvelles sphères légales.

D’abord, cette condamnation va permettre d’inclure les monnaies virtuelles dans les lois contre le blanchiment d’argent. C’est aussi le procès de TOR, un logiciel qui permet de rendre anonyme le trafic internet et dont dépendait Silk Road. Bien que parfaitement légal et même financé par le gouvernement américain, le réseau est de plus en plus présenté – à tort – comme le repère des pédophiles et de djihadistes. Le danger est que dorénavant, la simple volonté de recourir à des logiciels ou des protocoles permettant l’anonymat en ligne soit vu comme suspect.

Plus important, le dévoilement de la preuve de la Couronne durant le procès a donné un aperçu des moyens et des méthodes les plus à jour des services policiers. La localisation et l’obtention d’une copie du serveur de Silk Road en juillet 2013 a fait débouler l’enquête. Tout indique que le FBI a obtenu illégalement l’emplacement du serveur  (en Islande), puis a flirté avec les limites la loi (le 4e amendement) en le fouillant sans mandat. Leur argument, que la juge a finalement retenu: étant donné que personne n’a réclamé la propriété du serveur, lui-même hébergé chez un tiers, ils ne peuvent avoir enfreint ses libertés. Profitant dorénavant de la bénédiction d’une conviction, ces méthodes d’enquêtes plus que discutables sont appelées à être répétées.

Ces raffinements tactiques des forces de l’ordre confirment surtout que le hacker n’est plus le prédateur apex du web. Le mythe du jeune crack en informatique qui tourne au ridicule le mangeur de beigne moyen n’existe plus. Les États-nations et leur services policiers dominent désormais la chaîne alimentaire du web, ayant à leur disposition des ressources, de l’influence, de l’argent et un enrobage légal qu’aucun réseau indépendant ne peut compétitionner. La rapidité et la persistence avec laquelle Ross Ulbricht a été associé à six commandes de meurtres, crimes pour lesquels il n’existe aucune preuve et qui n’ont donc pas été inclus au procès, laisse penser que le gouvernement cherchait à démolir par tous les moyens l’accusé.

La stratégie de prédilection de l’État et ses exécutants est de profiter du meilleur du nouveau et du pire du vieux: exploiter des zones grises légales à l’aide de techniques de surveillance avancées et d’interprétation de lois inadaptées à la réalité d’aujourd’hui, le tout sanctionné par un des balises judiciaires inféodées. Le cas d’Edward Snowden, accusé selon des lois datant de 1917 pour éviter qu’il puisse invoquer la protection réservée aux lanceurs d’alerte («whistleblower), est un autre exemple probant de ce «new deal».

Cependant, il y a fort à parier que les entrepreneurs du darkweb, «freedom fighters» et autre «black hat» ont suivi avec attention ce procès, et pris note des erreurs – certaines grotesques – d’Ulbricht et des méthodes de la police. Le prochain ‘DPR’ occupera certainement plus longuement les jurés.

Ni incivil, ni invincible, mais illégal (des fois).

En ville, automobiliste et cycliste ne fonctionnent pas avec les même modes de punitions et de récompenses.

Parce que la sécurité physique du chauffeur est rarement compromise, c’est la loi qui sanctionne ses gestes et actions, par des amendes et la menace du retrait du droit de conduire (ainsi que les coûts en argent et en temps qu’engendrent un accident). Pour le cycliste, les conséquences légales ou financières d’une infraction sont bien inférieures aux sanctions physiques d’un accident.

J’avance que cette différence dans le rapport au Code de la sécurité routière est à la source de l’incompréhension entre usagers de la route, et une raison de l’obsession de certains à vouloir noter chaque infraction d’un cycliste, sans égard au contexte, à la situation ou à l’intention.

Parce qu’à vélo, on peut tout à fait être civil, sécuritaire, mais illégal. Tout comme il est parfaitement possible de mettre sa vie en danger en se tenant du bon bord de la loi. En deux mots, la loi n’est pas cohérente avec la réalité, et ne devrait donc pas servir d’unique guide du comportement.

Démonstration avec exemples courants et concrets.

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Daytona: Le rêve américain dans une boîte de céréales jetée par erreur (entrevue).

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Le Sud fait partie de l’imaginaire québécois.

C’est quoi «Le Sud»? C’est où

1) Il doit faire chaud.

2) On doit avoir l’impression de l’étranger.

3) Mais on doit s’y sentir comme chez-soi.

La première fois qu’on y va, on part «en voyage». Après, ce sont des «vacances», ce qui n’est somme toute pas la même chose.

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Silk Road: Pas une fin en soi(e).

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SWIM («Someone who isn’t me», pour reprendre une nomenclature connue) aimait profondément Silk Road. Sa discrétion, son ingéniosité de mélanger les avantages de la cryptographie avancée et de l’archaïque courrier. SWIM ne jurait que par la variété et la qualité inégalée des psychotropes qu’on y proposait. Il avait confiance au système mis en place pour évaluer les vendeurs. Il passait des heures à lire les conseils, commentaires, recommandations d’une communauté qui échangeait librement et sans jugement sur les façons optimales de consommer toutes les substance, autant pour que la première fois soit agréable que pour que l’expérience soit reproductible le plus longtemps possible.

À l’annonce de la saisie de Silk Road et de l’arrestation de son supposé créateur, SWIM a observé deux grandes familles de réactions : les «c’est quoi ça?» et les «Ben là, c’était évident qu’il allait se faire pogner!», «Acheter pis vendre de la drogue sur internet, c’est comme dans la vraie vie, c’est illégal».

Et pour vrai, le deuxième groupe gosse. Parce qu’il ne comprend pas plus Silk Road que le premier.

La «vente de drogue» n’était pas la fin en soi de l’entreprise.

SR, vécu de l’intérieur, c’était une tentative utopique, un essai sincère, un «beau risque». SWIM a toujours vu la difficulté d’y accéder comme une barrière que seuls les plus motivés franchissaient. À chaque fois que SWIM y entrait, il se sentait comme dans la toune Le Dôme de Jean Leloup.

C’était une solution durable, à petite échelle, misant autant sur l’éducation et le partage de connaissances que sur une qualité et une diversité de produits disponibles pour tous, partout. Quelque chose que le marché noir traditionnel n’a pas l’intérêt à émuler. Un système que seuls des passionnés peuvent mettre et maintenir en place. C’est le même argument qui s’applique dans l’agroalimentaire pour justifier la pertinence du bio, du local, de la traçabilité.

Bien sûr, les gens qui y participaient entraient dans une relation de marché, avec des acheteurs, des vendeurs et des profits. So what. Il ne passera jamais dans la tête de SWIM de s’indigner que le producteur de son poulet de grain tentent d’en vivre. C’était, en partie, illégal. OK. Mais la loi et la moralité sont de drôles de piliers sur lesquels poser ses convictions: ils sont toujours moins solides qu’on les pense, et quand ils s’écroulent, ceux qui s’y accrochent ont toujours l’air ridicules. La ligne entre «criminel» et «activiste des libertés civiles et individuelles» est, historiquement, toujours très relative. #assange #snowden #benladen #tsetoung #stalline #lutherking #parks #mandela #guevara #schindler #milk

SWIM se considère comme un cynique. Mais à SR, il y croyait. Maintenant que c’est tombé, SWIM demande sincèrement à ceux qui jugent SWIM d’avoir participé à une alternative concrète au statu quo: C’est quoi votre solution à la gestion des substances psychotropes? Ça ne peut pas être la prohibition… Alors, c’est quoi?

 

Baba Jukwa: La taupe qui utilise Facebook pour renverser Robert Mugabe.

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Un vieil homme blanc qui terrorise un vieux noir. Au Zimbabwe, c’était une histoire banale jusqu’à l’indépendance de ce qui s’appelait alors la Rhodésie, en 1965. Mais depuis mars dernier, les révélations troublantes de Baba Jukwa (le père de Jukwat) sur le parti de Robert Mugabe, président depuis trois décennies, sont perçues par plusieurs comme l’espoir le plus tangible pour vaincre un régime qui n’a fait que maquiller les techniques et desseins des anciens coloniaux.

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Je n’ai pas l’afficheur ou Guide pour les télécommunications efficaces au XXIe siècle.

Je n’ai pas l’afficheur.

1) Parce que j’ai déjà testé un vrai système de cellulaire dans d’autres pays, je trouve que c’est une des plus grandes crosses que les compagnies d’ici poussent. Dans les «vrais» systèmes, afficher le numéro (et souvent le nom) qui appelle, c’est une fonction gratuite (parce qu’elle ne coûte rien de plus aux compagnies). Ici, on les bloque délibérément pour surcharger.

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Armes et société: Les fusils des autres.

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J’ai évité toutes les discussions autour de Newtown. Il n’y a rien à dire d’un système dans lequel on a perdu le contrôle sur les armes en circulation. Que ça dérape en massacre une fois de temps en temps, aussi tragique cela-t-il puisse être, ce n’est pas une nouvelle, c’est une question de temps. On ne reproche pas à la pluie de mouiller.

Ensuite, les réactions sont du même acabit. Ce n’est pas parce qu’on ignore la ligne de lobby de la NRA la plupart du temps qu’elle n’existe pas pour autant. En trois mots: posséder une arme demeure la meilleure protection contre les armes.

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Django Unchained: l’éléphant dans la pièce n’est plus blanc.

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La majorité des critiques ont noté que Django reprenait un peu le collier de «Inglorious Basterds», c’est à dire réviser l’histoire en donnant à la victime les moyens de se venger contre son agresseur. Shoah ou traite des esclaves, sans analyser si l’un est pire, on est assez creux dans l’horreur humaine. Non, ce qu’il est important de noter, c’est qu’avec Django, Tarantino a ramené sur le territoire américain le malaise d’un «holocauste» (le mot est de Spike Lee) dont les US of A sont responsables, confrontant ses concitoyens à des horreurs de leurs bons ancêtres, pas celles de méchants Allemands, qui ont, de toute façon, perdu au jeu de l’histoire.

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